Après dix ans de tâtonnements, la procédure est lancée. Le parc naturel marin d'Iroise devrait être créé dans quelques semaines par décret. Sa mission ? Protéger la biodiversité d’un espace de 3550 km2 au large du Finistère et servir de référence à l’élaboration d’autres parcs naturels marins. La procédure a été longue pour lancer ce projet, novateur par plusieurs aspects.
Le 3 janvier 2007, le conseil municipal de l’île de Molène a créé la surprise en se prononçant en faveur d’un parc naturel marin en mer d’Iroise, au large du Finistère. Le vote des élus insulaires, dans le cadre de l’enquête publique sur la création du futur parc, s’est distingué ainsi de celui des deux autres îles, Sein et Ouessant, qui s’étaient opposées au projet. C’est peut-être parce que l’idée d’un parc d’un parc national est née à Molène à l’occasion de la création, en 1988, de la « Réserve de biosphère » de l’Unesco sur l’archipel. Il s’agissait alors de trouver un moyen de protection du milieu marin, les seules défenses de l’environnement existantes protégeant les îles et la côte.
Aujourd’hui, après la création de la Mission parc marin d’Iroise en 1996, après l’instauration d’un périmètre, en 2003, et l’adoption, le 30 mars2006, de la « loi relative aux parcs AGENCE DES AIRES MARINES
Avis favorable de la commission d’enquête
Signe de l’intérêt de la population pour ce projet, l’enquête publique sur la création du parc, organisée du 20 novembre au 22 décembre 2006, a réuni un grand nombre d’observations. La commission d’enquête a rendu, le 1er mars 2007, un avis favorable, assorti de trois réserves relatives au périmètre du parc, à son plan de gestion et à la composition du conseil de gestion. Les commissaires enquêteurs souhaitent qu’ « un projet d’extension du parc naturel marin d’Iroise, concernant l’inclusion de la rade de Brest et le déplacement de la limite nord du parc jusqu’au parallèle de l’Ile Vierge », soit soumis à enquête publique dans un délai de deux ans après la signature du décret de création. « Inclure la région des Abers, au nord de Brest, pourquoi pas », commente Claire Chapelle. « Mais intégrer la rade de Brest entraînerait de nombreuses difficultés, liées à la présence des bases militaires sous-marines et des industries. Cela pourrait compliquer les choses et entraîner un déséquilibre entre les petites communes et l’agglomération brestoise.»
La deuxième réserve réclame que le plan de gestion soit lui aussi soumis à enquête publique. La troisième réserve vise à élargir la composition du conseil de gestion du parc. Réunie le 16 mars 2007, l’Agence des aires marines a préconisé, pour lever ces réserves, de poursuivre la procédure de création « sans attendre l’enquête publique sur les extensions», d’intégrer à cette dernière le plan de gestion et d’augmenter « le conseil d’administration d’un élu et d’une association d’usagers, réservant d’autres sièges pour les extensions futures». Elle a ensuite donné un avis favorable à la naissance du Parc naturel marin d’Iroise.
Parallèlement à la consultation publique, 31 collectivités et de 16 organismes socio-professionnels ont été interrogés sur la pertinence du parc. Même si le débat a été vif entre ceux pour qui la notion de parc est incompatible avec l’espace de liberté qu’est la mer, et ceux qui considèrent que l’on doit réagir au plus vite aux nombreux signaux d’alerte à la pollution du milieu, 41 délibérations sur 47 étaient favorables. Et sur les 24 communes concernées, 17 ont voté pour, six contre et la dernière, Argol, n’a pas réussi à se décider.
« Le bilan de la consultation pour avis est très favorable au projet de création du parc naturel marin », se félicitent, dans un communiqué commun, la préfecture du Finistère et la préfecture maritime de l’Atlantique. « Une forte majorité des communes et des communautés de communes concernées est favorable au projet, même si les avis dans les trois îles sont plus partagés »
Un espace maritime de 3550 km2
Le premier parc marin de la mer d’Iroise vise trois objectifs fondamentaux : la connaissance du milieu marin, la protection de l’espace marin classé et le développement durable des activités dépendantes de la mer. Il a pour finalité d’intégrer la protection de l’environnement dans la gestion d’un espace maritime de 3550 km2 de façon intégrée. Un conseil de gestion devra décider des actions à prendre, en tenant compte des activités existantes, professionnelles ou de loisir. Véritable autorité du parc, il pourrait donner des avis ou proposer des réglementations aux services de l’Etat compétents, si le besoin s’en fait sentir.
Le conseil de gestion élaborera des programmes d’actions annuels, selon dix orientations : l’approfondissement et la diffusion de la connaissance des écosystèmes marins ; le maintien des populations des espèces protégées, rares ou menacées et de leurs habitats ; la réduction des pollutions d’origine terrestre ainsi que du risque de pollutions maritimes et portuaires diffuses ou accidentelles ; la maîtrise des activités d’extraction de matériaux ; l’exploitation durable des ressources halieutiques ; le soutien de la pêche côtière professionnelle ; l’exploitation durable des champs d’algues ; le soutien aux activités maritimes sur les îles afin d’y maintenir une population permanente ; la conservation et la valorisation du patrimoine paysager, architectural maritime et archéologique ; le développement raisonné des activités touristiques, nautiques et de loisir, compatible avec la protection des écosystèmes marins.
Dès 2004, des « actions de préfiguration » avaient été lancées pour anticiper la naissance du parc. Le comité local des pêches d’Audierne avait travaillé à la reconstitution des stocks de langoustes, un état des lieux du patrimoine naturel et culturel avait été établi pour assurer sa valorisation touristique auprès des acteurs locaux…
Pour le gouvernement, l’enjeu du parc naturel marin d’Iroise est double : protéger la biodiversité marine et élaborer une référence pour la création d’une dizaine d’autres parcs naturels marins, en métropole et en Outre-mer. Selon l’Agence des aires marines protégées, deux autres projets de parcs naturels marins pourraient être mis à l’étude très prochainement : l’un sur la côte de Cerbères-Banyuls et l’autre sur le lagon de Mayotte.